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lundi, 10 mai 2010

Jules Chéret

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Jules Chéret (1836-1932)


botot.jpgJules Chéret est né à Paris le 31 mai 1836 dans une famille d'artisans. Son père est ouvrier typographe. A 13 ans, il devient apprenti lithographe, mais il s'intéresse déjà à la peinture en se rendant régulièrement au Musée du Louvre, pour y admirer Rubens, Fragonard ou Watteau. Il devient peu après son apprentissage, ouvrier lithographe chez un imprimeur d'images pieuses et s'inscrit aux cours de l'Ecole Nationale de Dessin. Il trouve ensuite une place de dessinateur à Dôle et commence à réaliser des vignettes lithographiques pour la réalisation de brochures ou de couvertures de livres.
 Il quitte la France pour l'Angleterre en 1856, pour apprendre de nouveaux procédés sur les techniques de la lithographie en couleurs. De retour à Paris en 1866, il créé son imprimerie pour réaliser des affiches illustrées en couleurs. Le succés est rapide : Jules Chéret multiplie ses créations d'affiches de réclames publicitaires qui lui assurent sa notoriété. En 1881, il cède son affaire et devient Directeur artistique de l'Imprimerie Chaix, ce qui lui permet de se consacrer davantage à son œuvre de création : affiches, dessins, gouaches. En 1889, il réalise sa première exposition et reçoit une médaille d'or à l'Exposition Universelle ainsi que la Légion d’honneur.

 

Jules Chéret n'aime guère l'esprit des salons et des expositions. Il préfère proposer ses oeuvres directement par relations à des amateurs éclairés, tels que le Baron Vitta, ce qui explique pourquoi son oeuvre de peintre reste encore mal connue, occultée qu'elle est par son travail d'affichiste des années antérieures. A partir de 1895, Jules Chéret s'essaie dans une voie nouvelle qui est celle de la peinture de fresques murales, grâce à la commande de son admirateur le Baron Vitta pour la décoration de sa Villa « La Sapinière »,  à Evian

En 1898, Jules Chéret décide de s'installer à Nice avec son épouse. Au cours de l'année 1900, il reçoit  une commande pour la réalisation d'un rideau de scène au Musée Grévin, qui restera l'un de ses chefs d'œuvres dans ce domaine. Il reçoit également une commande pour la décoration d'un salon de l'Hôtel de Ville de Paris, qu'il achève en 1902.  En 1905, il participe à la décoration de la Taverne de Paris et en 1906-1907, il décore la salle des fêtes de la Préfecture de Nice sur le thème du carnaval et de la fête. A côté de ses activités professionnelles de décorateur et à sa production de dessins et d'études préparatoires, Jules Chéret réalise de nombreux pastels et des peintures dont le sujet d'inspiration principal sera la femme dans sa beauté, sa grâce, sa coquetterie vestimentaire. Il peint également de nombreuses œuvres sur le thème de la Commedia dell'Arte, la fête, et des scènes champêtres.  Dans les années 1920, atteint de cécité, il doit abandonner la peinture, et vient résider le plus souvent à Nice. Le Baron Vitta lègue à la ville de Nice une graCheret-ToulouseLautrec.jpgnde partie de sa collection d'œuvres de Chéret, ce qui permet d'y ouvrir le Musée des Beaux Arts Jules Chéret. L'inauguration se tient en janvier 1928 en présence de l'artiste, et c'est le peintre symboliste Gustav-Adolf Mossa qui est est nommé le premier conservateur.  Quatre ans plus tard, le 23 septembre 1932, Jules Chéret décède à l'âge de 86 ans, pour être inhumé selon ses vœux au cimetière St Vincent de Montmartre à Paris.

 

Le personnage fétiche de ses affiches est une femme joyeuse, élégante et qui semble toujours en mouvement. On la reconnaît facilement et elle est une des caractéristiques du style de Chéret : c'est la « Cherette ».

L'œuvre de Chéret exercera une influence sur les peintres de son époque : Toulouse-Lautrec  (photo ci-contre), Pierre Bonnard, Édouard Vuillard en France ; Dudley Hardy en Angleterre ; Henri Meunier et Privat Livemont en Belgique. Le style de Chéret a marqué son époque. Avec lui, l'image se libère de l'espace de la feuille : les personnages sont vus par dessous, imprimant un mouvement qui est fait pour être vu en levant la tête, par les passants. La scène évoquée a toujours un air de fête, qu'il s'agisse de célébrer l'expo ou un apéritif.

 

Ici la palette n'est pas sans nuance mais l'effet est sobre et efficace. L'image, aussi économe, sacrifie le décor, exclut tout contexte pour se concentrer sur la figure féminine.
chéret.jpgLe rouge et le noir sont les couleurs dominantes. Elles sont soumises à un dessin qui les retient dans les détails de la figure. Elles sont traitées en opacité comme des aplats de gouache et viennent trancher sur la transparence des effets aquarellés du fond violet-mauve. L'espace dévolu au texte est important mais il ne nuit pas à l'image. Les ensembles textuel et iconique dessinent un grand " Z ", forme dynamique de prédilection des compositions de l'auteur.

L'organisation générale prend assise sur la diagonale gauche-droite et bas-haut du format rectangulaire. La figure féminine s'y enroule dans un mouvement de vrille qui guide le regard. Celui-ci part du pied gauche en suspens et glisse jusqu'au plateau où repose le produit vanté. La figure sert ainsi d'amorce à la lecture. Le regard pénètre avec elle sur la scène des mots. Littéralement, le regard enrobe le personnage et vient s’arrêter sur la bouteille, qui fait un angle droit avec le plateau. Cet élément stable et sûr lui sert d'appui pour s'élancer à la conquête du très lisible APERITIF MUGNIER. En pointe de flèche sur l'arc des mots, le violet du fond accompagne et renforce ce mouvement ascensionnel jusqu'à la lecture. A partir d'elle les éléments textuels se détachent de l'image pour livrer leurs informations.

Le texte et l'image se répartissent en deux registres, identifiés par les couleurs noir et rouge. En rouge, le premier registre du message publicitaire associe des éléments qui sont de nature symbolique. La marque, qui est un nom propre venu s'identifier à un produit sur le marché des valeurs économiques et la récompense, qui est un signe de reconnaissance institutionnelle.

Ces textes sont relayés au plan iconique par l'image de la serveuse habillée de dominantes rouges. Image déclinée du stéréotype féminin qui " sert " la publicité en général et tout particulièrement la publicité française à cette époque. Elle symbolise ici le service idéal, condensant sous une forme réaliste et triviale les idées de rapidité, de sécurité et d'amabilité.

L'autre registre, en noir, se rapporte à l'expérience concrète du consommateur. Il l'informe que le produit est distribué dans tous les cafés. Il le renseigne sur l'aspect de la bouteille et sur l'origine géographique du fabricant. Fabricant auquel il donne un poids existentiel et une valeur subjective: c'est Frédéric Mugnier, le seul fabricant de l'apéritif MUGNIER, de Dijon. Mais cette dernière information vient créer une tension entre les deux " MUGNIER ". Si l'image de la bouteille et du verre sur le plateau reste la valeurs sûre sur laquelle peut se reposer le regard du spectateur, le lecteur, lui, est conduit à une spéculation incertaine entre produit et marchandise. Parce qu'elle ne tranche pas entre la forme subjective du fabricant et la forme objective de la marque de fabrique, cette publicité se pare donc à nos yeux d'une certaine étrangeté. Nous sommes là, entre chenille et papillon, devant un objet en quête d'identité économique, un produit hésitant à se définir comme signe.

La diagonale familière et véloce de la serveuse qui le transporte est sans doute un biais pour l'y aider.

 

 

 

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