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dimanche, 21 mars 2010

Signes, icones, symboles

Les images entretiennent avec leurs modèles des relations que les sémiologues se sont efforcés de distinguer et de classer. Selon la classification de Charles S. Peirce, on en retient ordinairement trois : l’indice, l'icône, le symbole

247. Un Icone est un signe qui fait référence à l'Objet qu'il dénote simplement en vertu de ses caractères propres, lesquels il possède, qu'un tel Objet existe réellement ou non. (...) N'importe quoi, que ce soit une qualité, un existant individuel, ou une loi, est un icone de n'importe quoi, dans la mesure où il ressemble à cette chose, et en est utilisé comme le signe.

248. Un Indice est un signe qui fait référence à l'Objet qu'il dénote en vertu du fait qu'il est réellement affecté par cet objet (...) Dans la mesure où l'Indice est affecté par l'Objet, il a nécessairement certaines qualités en commun avec cet Objet, et c'est sous ce rapport qu'il réfère à l'Objet. Il implique, par conséquent, une certaine relation iconique à l'Objet, mais un icone d'un genre particulier; et ce n'est pas la simple ressemblance à son Objet, même sous ces rapports, qui en font un signe mais les modifications réelles qu'il subit de la part de l'Objet.

249. Un Symbole est un signe qui se réfère à l'Objet qu'il dénote en vertu d'une loi , habituellement une association générale d'idées, qui provoque le fait que le Symbole est interprété comme référant à l'Objet.

Charles Pierce Éléments of Logic, (1903), in Collected Papers, Harvard University Press, 1960

 

Première distinction : INDICE & SIGNAL

Ce qui distingue l’indice du signal, c’est l’intention de communiquer que l’indice n’a pas, mais que le signal a : Uun ciel d’orage n’a pas l’intention de communiquer avec nous. Pourtant, comme le dit Pierce, « il fait référence à l’objet qu’il connote (la pluie) en vertu du fait qu’il est réellement affecté par l’objet ». Un ciel d’orage est un indice de pluie. L’indice, en effet, entretient un rapport physique, matériel, avec la chose qu’il désigne. Autre exemple : une trace de pas. C’est le pied (ou la chaussure) qui a produit l’indice. Il y a un rapport direct, physique entre les deux. L’indice est prélevé au monde. Les animaux, la nature peuvent laisser des indices, mais ils ne peuvent produire des signaux. Ce qui lie la trace de pas au pied (ou à la patte) qui l’ont produite est un rapport de causalité.

Tous les signes qui ne sont pas des indices, parce qu’ils sont produits par une intention de communiquer, sont des SIGNAUX. On distingue parmi eux les symboles et les icones

Deuxième distinction : SYMBOLE, ICONE[1]

L’intention de communiquer a permis de distinguer indice et signal. L’examen des liens qui existent entre A & B permet une deuxième distinction parmi tous les signaux possibles :

ICONE : Lorsque la relation d’analogie va jusqu’à une relation de ressemblance (rapport mimétique), c’est un icone. Pour les Grecs anciens, l'icône par excellence est une statue en vraie grandeur d'un personnage humain : c'est le prototype de l'image mimétique. L’icone, contrairement à l’indice, est rajouté au monde. Seuls, les humains peuvent les produire. L’icône est la catégorie la plus haute d’images, la plus conceptuelle. Il y a une grande quantité d'icones largement utilisées par nos sociétés modernes et qui sont reconnaissables par un grand nombre d'individus dans les sociétés modernes.

Il est relativement facile d'identifier, d'après les icones présentés ci-dessus, les significations de clavier, de bar, de souris, d'imprimante, de restaurant et de loupe pour modifier la taille d'un objet. Ces significations sont évidentes à cause du lien analogique direct entre l'élément utilisé pour représenter la réalité et son rapport extrêmement étroit avec l'objet qu'il représente. Les icones sont utilisés dans la signalétique et le sont de plus en plus sur le Web.

 

LA COUPURE SEMIOTIQUE

On appelle coupure sémiotique la séparation entre signifiant et le référent: le mot chat ne miaule pas, le mot chien ne mord pas ; Gregory Bateson disait qu’  « en donnant un coup de pied au mot chien, on pouvait le mettre sur orbite ». Dans le même genre, il y a la célèbre citation d’Alfred Korzybski : « La carte n’est pas le territoire ». Je n’aurai pas les mêmes sensations en parcourant la carte et en parcourant le territoire ; je ne verrais pas sur le territoire les icones (voire les symboles) qui parcourent la carte.

SYMBOLE : Lorsqu’une une relation de représentation culturelle existe entre la forme du signal et l’élément de la réalité qu’il indique ce signal est un symbole. Par exemple, le drapeau rouge est le symbole de la Révolution. Ce qui lie la révolution au drapeau rouge est une convention, pas une ressemblance.

• une colombe symbolise un message de paix;

• signaux routiers : cercle rouge avec une ligne transversale symbolise aussi une interdiction.
• les tours du WTC de New York symbolisaient la suprématie financière de cette ville
• la couleur bleu poudre, dans les forces armées, symbolise une force neutre (casques bleus)
• le champagne (marque Dom Pérignon) symbolise la richesse et le luxe extrême

Triangle sémiotique de Peirce : il faut penser l'image (ou icône) entre l'indice et le symbole

L'image est prise entre deux blocs sémiotiques distincts : d'un côté le symbole, de l'autre l'indice. On peut lire ce schéma de façon chronologique ou phylogénétique.

peirce-triangle.jpg1. A l'origine, il y a l'immense domaine des indices, que nous partageons avec les animaux. L'indice est un fragment arraché aux phénomènes, un échantillon prélevé sur le monde. Dans la nature, c'est une chose parmi les choses : la fumée est l'indice du feu, la rougeur l'indice de la fièvre, etc... Il fonctionne par contact de manière matérielle, physique, en continuité. C'est une « partie de », un prélèvement.

2. A partir de l'indice se détache la sphère des icônes. C'est un saut, une coupure, une rupture des continuités indicielles : le saut humain ou anthropologique par excellence. Exemples : un reflet dans l'eau, une ombre sur un mur, des mains primitives visibles dans une caverne, une image. L'icône s'ajoute au monde alors que l'indice est prélevé sur lui. En général elle est figurative, elle fonctionne sur un mode analogique (la ressemblance). Elle a un double tropisme, tantôt vers l'indice, tantôt vers le monde logico-langagier. Dans notre culture, les images sont subordonnées aux mots qui les cadrent, les légendent.

3. Une deuxième coupure sépare les symboles des icônes, la coupure sémiotique. Elle fait venir l'ordre, le code, l'arbitraire du signe, tout ce que veut dire logos : calcul, raison, langage, relation verbale, distinction, représentation, concept. Là commence le processus secondaire  par opposition aux images (primaires).

EN RESUME : L’indice fait partie de la réalité, et entretient un rapport de causalité avec ce qu’il représente ou désigne. L’icône et le symbole sont des créations humaines. L’icône a une relation de ressemblance avec ce qu’il désigne. Le symbole une relation conventionnelle et donc arbitraire.

INDICE (aucune intention)

SIGNAL (Intention de communication)

p67im1.jpg

ICONE

SYMBOLE

u30933528.jpg

caution-1.gif

Indice d’une empreinte de pas, icône d’un restauroute, symbole appelant à l’attention.



[1] prend un accent circonflexe. Mais sous cette forme il a une signification religieuse. D'où la préférence qu'on accorde ici (par référence à  l'anglais icon) à  icone, au masculin et sans accent.» D'après : GARDIES (André), BESSALEL (Jean), 200 mots-clés de la théorie du cinéma, Paris, Editions du Cerf, 1992.

15:44 Publié dans théorie du signe | Tags : peirce | Lien permanent | Commentaires (0)

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